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La présente ligne directrice porte sur la responsabilité des locateurs d'assurer l'entretien des ensembles d'habitation et des logements locatifs, et elle offre un choix pertinent de mesures de redressement
L'article 20 de la Loi sur la location à usage d'habitation, 2006 (la « LLUH ») prévoit ce qui suit :
Un locataire pourra s'adresser à la Commission en vertu de la disposition 1 du paragraphe 29(1) de la LLUH pour obtenir une ordonnance qui établira si le locateur a manqué à ces obligations1. Si la Commission détermine qu'un manquement est survenu, l'article 30 prévoit certaines mesures de redressement qui peuvent être ordonnées, dont l'exécution de certains travaux, une diminution de loyer ou la résiliation de la location. La Commission peut aussi ordonner au locateur de verser au locataire une somme pour indemniser ce dernier des frais qu'il a engagés pour réparer ou remplacer des biens qui lui appartiennent et qui ont été endommagés, détruits ou dont il a disposé à la suite du manquement du locateur, ainsi que d'autres frais raisonnables. En outre, la Commission peut accorder des dommages-intérêts généraux en cas de manquement à la convention de location.
L'intention des articles 20, 29 et 30 est de rendre les locateurs responsables de l'entretien de leurs ensembles d'habitation, afin qu'ils ne limitent pas leurs obligations en les transférant par contrat aux locataires. Pour toute situation où un locataire aurait accepté dans un bail d'assumer l'entretien en tout ou en partie du logement locatif ou de l'ensemble d'habitation, autre que de garder le logement en bon état de propreté ou de réparer les dommages causés, cette clause ne serait pas exécutoire2.
Il faut interpréter la loi de la façon qui favorise le meilleur entretien possible des ensembles d'habitation et des logements locatifs. Le locateur est tenu de remédier à tout manquement à ses obligations d'entretien et de respecter les normes applicables. Lorsqu'on constate une déficience, le manquement aux obligations d'entretien donnera lieu à une ordonnance en vertu de l'article 30. Dans certains cas, le locateur sera également tenu de compenser les locataires pour des problèmes dont il était averti, ou dont il est raisonnable de croire qu'il les connaissait, mais auxquels il n'a pas remédié.
Le locateur ne pourra invoquer en défense qu'il avait besoin d'argent pour d'autres raisons, même si c'était pour effectuer d'autres réparations. Lorsqu'il s'avérera nécessaire d'effectuer de nombreuses réparations dans un ensemble d'habitation, le membre pourra tenir compte du fait que certains travaux auront la priorité, et pourra retarder l'ordonnance d'autres réparations. Cependant, l'obligation d'entretenir un local d'habitation n'est pas assujettie aux moyens dont dispose le locateur.
L'ensemble d'habitation ne s'arrête pas au logement locatif occupé par le locataire, il comprend également les installations et les aires communes mises à la disposition des locataires par le locateur. Il englobe le hall d'entrée, les couloirs, les cages d'escalier, les installations de buanderie, les terrains de stationnement, les terrains extérieurs, les installations récréatives, etc.3
Toutes les installations physiques que le locateur aura louées au locataire, ou permis au locataire d'utiliser, devront être entretenues par le locateur. Ceci comprendra les installations qui pourraient ne pas être attenantes à l'ensemble d'habitation, mais que le locateur s'est expressément engagé à fournir (comme une piscine située dans un bâtiment proche, un stationnement dans un parc avoisinant, de l'entreposage dans un lieu séparé, etc.).
Dans Quann c. Pajelle Investments Ltd.4, le tribunal a décidé ce qui suit :
[Traduction] Par les temps qui courent, la location d'un appartement urbain dans un bâtiment de bonne taille offre au locataire un assortiment de biens et de services. Ceux-ci n'englobent pas seulement des murs et un plafond, mais également le chauffage, l'éclairage et l'aération, des installations sanitaires utilisables, des fenêtres et des portes sûres, un assainissement et un entretien adéquats, les droits garantis au locataire [...] Si le locateur ne remplit pas ses obligations, le locataire est en droit d'obtenir une mesure de redressement...
Un locateur pourra affirmer qu'il dispose d'un bon programme d'entretien et de réparation, qui comprend un entretien préventif et une méthode de traitement des plaintes. Mais il ne pourra l'invoquer comme excuse pour se dérober à ses responsabilités, c'est-à-dire de remédier à un problème véritable. Toute pratique de gestion raisonnable commande de traiter les demandes d'entretien en fonction de leur priorité (par ex. de colmater une fuite d'eau avant de cimenter un carreau mural), mais toutes les demandes légitimes doivent être traitées dans un délai raisonnable.
La disposition 4 du paragraphe 27(1) de la LLUH permet à un locateur d'entrer dans un logement locatif pour effectuer une inspection conformément à un préavis écrit donné au locataire au moins 24 heures avant l'heure d'entrée si :
L'ancien ou le présent locataire est tenu de présenter une requête dans l'année qui suit la date à laquelle le manquement prétendu s'est produit. Pour déterminer si une requête a été présentée dans le délai prévu au paragraphe 29(2) de la LLUH, le membre devra déterminer quand le manquement prétendu s'est produit.
Lorsque le manquement est lié à un seul événement tel qu'une entrée illégale, le délai de prescription commence le jour où se produit l'événement en question. Si l'événement est continu ou répétitif, par exemple le manquement à une obligation d'entretien ou le nonrespect de normes, alors le manquement s'étend sur une période donnée et le délai de prescription commence à la date où les travaux de réparation sont achevés ou que la norme est respectée. L'obligation d'entretien du locateur est continue et ne prend fin que lorsque ce dernier s'en est acquitté. Dans tous les cas, le délai de prescription est d'un an.
Le délai de prescription prévu au paragraphe 29(2) de la LLUH a pour but de faire en sorte que le requérant ne dispose que d'un délai donné pour présenter une requête et obtenir un redressement. Cependant, la requête peut être présentée n'importe quand durant le délai de prescription. Par exemple, un logement ou un ensemble d'habitation peut faire l'objet de divers problèmes qui sont survenus à des moments différents et qui ont progressivement empiré, entraînant une situation où le manque de réparations aura motivé le locataire à présenter une requête. Le fait que le locataire n'ait pas présenté sa requête au moment où s'est produit le manquement n'a pas d'incidence sur son droit de déposer une requête. Aucune disposition de la LLUH n'exige que le locataire présente une requête dès que le locateur manque à une obligation. Cependant, le locataire ne peut inclure dans sa requête une situation à laquelle le locateur a remédié plus d'un an avant la présentation de la requête.
Si la requête est déposée dans le délai prévu au paragraphe 29(2) et que le manquement a cessé à la date où est rendue l'ordonnance, la Commission peut accorder une mesure de redressement (p. ex. une diminution de loyer) pour la période commençant un an avant la date du dépôt de la requête et s'étendant jusqu'à la date où a pris fin le manquement. Si le manquement se poursuit à la date où est rendue l'ordonnance, la mesure de redressement potentielle peut s'appliquer à une période postérieure à l'ordonnance qui s'étend jusqu'à la date où cesse le manquement (Goodman and Pearlman c. Menyhart and Menyhart, [2009] O.J. No. 1602, et Toronto Community Housing Corp c. Allan Vlahovich, [2010] O.J. No. 1463). (Voir également la section intitulée « Ordonnances de redressement », qui figure plus loin dans la présente ligne directrice).
La plus récente décision portant sur l'application appropriée du paragraphe 29(2) est celle rendue par la Cour divisionnaire dans l'arrêt Toronto Community Housing Corp. c. Vlahovich, [2010] O.J. No. 1463. La Cour a déclaré ce qui suit :
[Traduction] À la lumière du délai de prescription d'un an prévu au paragraphe 29(2), la Commission ne peut qu'établir que le locateur a manqué à l'obligation qu'il a en vertu du paragraphe 20(1) pendant la période d'un an qui a précédé la présentation de la requête. Par conséquent, la mesure de redressement pouvant être accordée ne peut s'appliquer qu'aux manquements survenus durant cette période d'un an.
Dans l'arrêt Vlahovich, la Cour divisionnaire a expliqué que, si elle était bien interprétée, la décision antérieure qu'elle avait rendue dans l'arrêt Goodman c. Menyhart, [2009] O.J. No. 1602 concordait avec l'approche adoptée dans l'arrêt Vlahovich. La Cour a souligné que le tribunal de juges de la Cour divisionnaire dans l'arrêt Goodman c. Menyhart avait ordonné qu'une diminution soit accordée pour une période d'au plus un an avant le dépôt de la requête. Dans l'arrêt Vlahovich, la Cour a indiqué que dans l'arrêt Goodman c. Menyhart, la seule question en litige était de savoir si le délai de prescription de douze mois commençait à la date où la Commission avait rendu son ordonnance ou à la date du dépôt de la requête. Conformément au raisonnement de la Cour dans l'arrêt Vlahovich, le délai de prescription d'un an commençait à la date du dépôt de la requête dans ce cas précis.
L'alinéa 195(1)b) prévoit que si elle le juge approprié, la Commission peut permettre au locataire qui demande par requête une ordonnance visant une obligation d'entretien de lui consigner la totalité ou une partie du loyer de son logement locatif. Le paragraphe 195(5) prévoit qu'une telle consignation de sommes par le locataire est réputée ne pas constituer un défaut de paiement du loyer ni un manquement à ses obligations de locataire. Tel que discuté dans les Lignes directrices 2 « Sommes consignées à la Commission », ces requêtes ne sont accordées que dans des circonstances spéciales.
Se reporter à la Règle 20, Consignation de sommes à la Commission et prélèvements sur ces sommes, pour obtenir des renseignements sur les procédures de demande de consignation de loyer à la Commission.
Le requérant est dans l'obligation d'établir la nature des problèmes qu'il soulève, afin que l'intimé puisse avoir la possibilité de se préparer pour l'audience. La formule de requête énoncera les éléments qui forment l'allégation du besoin d'entretien ou de réparation ou de la non-conformité aux normes ainsi que toute demande d'indemnisation de frais engagés pour réparer ou remplacer des biens endommagés, détruits ou jetés. On pourra rejeter la requête si elle ne comporte pas de détails ou encore permettre au requérant d'y apporter des précisions. Dans certains cas, il faudra prévoir un ajournement afin que le locateur soit en mesure de préparer ses réponses.
Même lorsque le locataire a précisé dans sa requête les éléments qui ont besoin d'être réparés ou qui constituent des enfreintes aux normes, et sa demande d'indemnisation, il pourra parfois présenter de nouveaux éléments à l'audience. Il incombe au membre de décider s'il va permettre la présentation de ces nouveaux éléments, généralement après avoir entendu le locataire expliquer pourquoi il n'a pas soulevé ces problèmes auparavant, et le locateur faire part de tout préjudice qu'il pourrait subir en répondant à ces nouveaux éléments. Il doit exister un lien entre les nouveaux éléments et ceux qui ont été soulevés à l'origine.
Chacun des éléments que soulève le locataire et auquel on n'a pas remédié au cours de la dernière année doit être examiné à la lumière des critères établis par l'article 20. Par exemple, s'il s'agit d'une plainte afférente à un manque de chauffage, le membre devra établir si c'est parce que le locateur n'a pas maintenu l'habitation en bon état, ou si le logement est impropre à l'habitation en raison du manque de chauffage et que le locateur ne s'est donc pas conformé aux normes. Lorsque le problème allégué par le locataire appartient à l'une de ces catégories, il justifiera une conclusion de manquement aux obligations.
De manière générale, lorsqu'il y a une divergence entre ce qui, selon le membre, est nécessaire pour « maintenir en bon état et propre à l'habitation » et les normes imposées par l'administration locale responsable - et que le locateur s'est conformé à celles-ci - les membres ne pourront prononcer le locateur coupable d'un manquement aux termes de l'article 20.
L'obligation du locateur prévue par l'article 20, qui est celle de garder les locaux loués en bon état, est très générale. Elle comprend tout ce qui pourrait faire l'objet d'une réparation et ne se limite pas à la convention de location.
Plusieurs affaires se sont également penchées sur la signification de ce qui constitue un logement « propre à l'habitation ». Une des plus importantes entendues à ce sujet en Grande-Bretagne était Summers c. Salford Corp5. La Cour a soutenu que si l'état de délabrement est tel que l'occupant peut subir des dommages découlant d'une utilisation normale, qui porteraient atteinte à sa vie, qui pourraient entraîner des blessures ou nuire à sa santé, le logement est considéré comme impropre à l'habitation.
L'expression « propre à l'habitation » ne représente pas la norme attendue, et ne devrait pas servir à limiter ou à qualifier le « bon état » des lieux. En général, il suffit qu'une partie du local soit impropre à l'habitation. On pourrait citer à titre d'exemple une infestation de rongeurs ou de vermine, une salle de bain inondée par un refoulement d'eaux usées, des pièces aux fenêtres cassées, etc.
La plupart des normes figurent dans les règlements municipaux sur les normes des biensfonds, mais on en trouve également dans les normes provinciales comme celles du code des incendies, les normes afférentes aux ascenseurs ou la norme provinciale prévue par la Loi (voir ci-après). Le locataire est dans l'obligation de faire mention de la norme pertinente au membre, habituellement en déposant un exemplaire du règlement, de la Loi ou tout autre document soit avant l'audience, soit durant celle-ci. Le membre pourra par ailleurs user de sa propre initiative pour invoquer la norme dont il est question.
Lorsqu'un avis d'infraction, un ordre d'exécution de travaux ou une autre ordonnance a été signifié à l'endroit de l'ensemble d'habitation ou du logement locatif, il s'agit d'une constatation par un représentant officiel que le locateur a enfreint une norme. Une fois que le locataire remet un exemplaire de l'avis ou de l'ordonnance, un membre pourra l'accepter à titre de preuve de non-conformité à une norme. Cependant, le locateur aura le droit de demander à la Commission de trancher la question s'il conteste l'avis ou l'ordonnance. Dans ce cas, il devra soulever la contestation, déposer le document et avancer des preuves à l'appui de son argument.
Un locateur pourra soutenir que l'ordre d'exécution des travaux n'a pas pris effet et ne devrait pas être considéré, si le délai accordé pour la conformité n'est pas encore révolu. En fait, de nombreux ordres d'exécution des travaux sont émis lorsque la non-conformité à une norme persistait depuis déjà quelque temps. Or, le fait qu'une autre administration a accordé plus de temps au locateur pour remédier au problème ne signifie pas pour autant qu'il n'y en a plus et il ne faudra donc pas rejeter l'affaire pour cette raison. Bien entendu, si c'est en raison de l'ordre d'exécution des travaux que le locateur a découvert l'existence du problème, le fait que le délai de conformité n'a pas été dépassé pourrait suggérer un redressement autre que pour un problème de longue date qui a été négligé.
Un locateur pourra également affirmer que les mesures prises par l'administration publique en vertu de l'ordre d'exécution des travaux, telles qu'une poursuite fondée sur une infraction provinciale, devraient constituer une pénalité suffisante pour l'atteinte aux normes. Lorsque le membre décidera du redressement indiqué, il devra donc établir s'il y avait non-conformité à une norme, tout en tenant compte du fait que le locateur a versé une amende.
Quand aucune plainte n'a été déposée auprès de l'administration publique pertinente, la Commission devra entendre les preuves à l'appui et tirer ses propres conclusions. Il n'est pas nécessaire qu'une autorité responsable émette un avis de violation pour conclure qu'il y a eu violation de l'article 20.
Lorsque le requérant soutient qu'une condition d'entretien est inférieure aux normes, mais qu'il ne possède pas de preuve quant à la nature exacte de la norme à l'audience, le membre pourra l'examiner à la lumière des autres faits (bon état et caractère propre à l'habitation). Par ailleurs, le locateur pourra invoquer lui-même la norme et indiquer qu'il s'y conforme.
Le Ministère du Logement pourra également signifier un ordre d'exécution des travaux pour une municipalité qui ne possède pas ses propres règlements administratifs portant sur les biens-fonds. Il y est autorisé en vertu de la norme d'entretien provinciale établie dans les règlements6.
Certains locataires voudront se prévaloir de la norme d'entretien provinciale, même lorsque leur municipalité dispose d'un règlement afférent aux normes sur les biens-fonds. L'article 20 exige cependant des locateurs qu'ils se conforment aux normes, et ceci doit être interprété comme visant uniquement les normes qui sont exécutoires pour l'ensemble d'habitation.
Les locateurs peuvent choisir de suivre des programmes d'entretien préventif. Par contre, un locataire ne pourra insister pour que le locateur effectue des travaux particuliers d'entretien préventif au titre d'une réparation nécessaire.
Lorsque les locateurs effectuent des réparations, il arrive souvent qu'elles donnent lieu à des contestations sur la qualité de la réparation. Le locataire ne détient pas le droit d'insister sur une norme de perfection pour les réparations. De même, un locateur ne pourra se prévaloir de réparations mal faites pour se décharger de son obligation à cet égard, tout particulièrement si elles n'ont eu aucun effet ou qu'elles ont entraîné le besoin de nouvelles réparations.
Le locataire doit présenter sa requête dans l'année qui suit le manquement aux obligations; même si le problème a été résolu avant le dépôt de la requête, on ne pourra pour autant en exclure l'examen. Il semblerait toutefois que les affaires suivent généralement le principe selon lequel, lorsqu'un locateur a pris des mesures valables et a remédié au problème dans un délai raisonnable, aucune diminution ou autre redressement ne devrait être ordonné.
La ponctualité des mesures prises dépend de nombreux facteurs, mais avant tout de la gravité de la situation et des répercussions possibles sur le locataire, ainsi que de la disponibilité des matériaux et des entrepreneurs en mesure d'effectuer la réparation. Le locataire pourra par ailleurs soutenir que les réparations entreprises par le locateur étaient sans effet ou mal faites, ce qui a diminué la valeur du logement ou laissé le problème tel quel. Le membre traitera ces questions directement à l'aide des preuves soumises et prendra une décision en fonction de celles-ci.
L'article 34 de la LLUH prévoit que le locataire est responsable de la réparation des dommages injustifiés que lui-même, un autre occupant du logement locatif ou une personne à qui le locataire permet l'accès de l'ensemble d'habitation cause, intentionnellement ou par sa négligence, au logement ou à l'ensemble. Il incombera au membre de trancher la question lorsque le locateur soutient que les réparations exigées par le locataire relevaient en fait de la responsabilité de ce dernier.
De même, il pourra s'avérer nécessaire d'entendre la preuve à l'appui d'une allégation que le locataire ou les personnes à qui le locataire a permis l'accès de l'ensemble d'habitation ont contribué à la gravité du problème d'entretien ou aggravé le besoin d'effectuer des réparations. Il se pourrait que le locataire ait sans motif raisonnable empêché le locateur d'entrer dans le logement locatif pour évaluer le problème ou effectuer des réparations. Dans un tel cas, on pourra quand même ordonner au locataire ou au locateur d'effectuer les réparations, mais le comportement du locataire pourrait interdire toute diminution de loyer ou autre mesure de redressement.
En supposant que le membre a entendu la preuve et décidé que le locateur a manqué à ses obligations, il devra tenir compte de nombreux facteurs avant d'inclure dans l'ordonnance ou une plusieurs mesures de redressement.
Le membre devra demander aux parties de déposer leur argumentation sur les mesures de redressement appropriées pour chaque élément. Le requérant et l'intimé auront peut-être débattu du litige et seront parvenus à une entente portant sur le type ou le montant du redressement à octroyer; cependant, le membre n'est pas tenu de se conformer à une telle entente.
Aux termes du paragraphe 30(2) de la LLUH, lorsqu'il détermine la mesure de redressement, le membre examine la question de savoir si le requérant a informé le locateur des prétendus manquements avant de présenter sa requête. Même si le locataire n'a pas informé le locateur avant de présenter sa requête, cela ne veut pas dire pour autant que la requête doive être rejetée ni que l'élément doive être rejeté.
Bien que la meilleure pratique consiste à ce que le locataire prévienne le locateur par écrit de l'existence de tout problème sérieux, cette disposition n'exige pas que l'avis doive être obligatoirement établi par écrit. Lorsque le locataire soutient qu'il a informé le locateur verbalement, il doit convaincre le membre grâce à son témoignage que l'avis a été donné au locateur ou à un de ses employés, et à quel moment il l'a fait.
Cependant, le défaut d'informer le locateur influera sur les redressements qui seront ordonnés, à moins que le locateur soit déjà au courant du problème ou aurait dû être au courant de celui-ci. Un requérant ne devrait pas se voir attribuer une compensation moindre qu'à un autre locataire s'il savait raisonnablement que d'autres locataires s'étaient déjà plaints ou que le problème aurait dû être évident pour le locateur ou ses employés.
En vertu de l'article 30, le membre peut ordonner au locateur d'effectuer les travaux de réparation ou autres précisés dans un délai fixé.
La plupart des locataires qui présentent une requête le font parce qu'ils veulent que l'on ordonne au locateur d'effectuer les réparations ou remplacements. Par conséquent, lorsqu'on arbitre ou que l'on règle ces requêtes, l'entente doit généralement comprendre la promesse du locateur d'effectuer les travaux auxquels il a consenti dans un certain délai.
L'ordonnance doit donc décrire précisément les réparations ou remplacements qui doivent être effectués et les délais impartis, lesquels doivent être réalistes et tenir compte des contraintes saisonnières et de tout autre facteur qui pourrait retarder les travaux. Un membre peut ordonner qu'un locataire déduise un montant des futurs versements de loyer si un locateur n'exécute pas l'ordonnance dans le délai prescrit.
En vertu de l'article 30, le membre peut autoriser des travaux de réparation ou des remplacements effectués ou à effectuer et ordonner que le locateur en rembourse les frais au locataire.
Il s'agira d'un redressement approprié lorsque le défaut du locateur de se conformer à ses obligations d'entretien a forcé le locataire à effectuer les réparations ou le remplacement. Par exemple, si un locataire a déjà réglé la réparation de son réfrigérateur, le membre pourrait autoriser la réparation et ordonner au locateur de rembourser au locataire les frais qu'il a engagés (à condition qu'ils soient raisonnables) à une date précise, ou permettre au locataire de déduire ce montant de son loyer.
En général, lorsque les réparations ou remplacements n'ont pas encore été effectués, qu'ils sont difficiles ou qu'ils doivent être faits conformément à des travaux similaires effectués dans l'ensemble d'habitation, il vaut mieux que ce soit le locateur qui les fasse.
Lorsque les réparations ou remplacements pourraient être effectués correctement par le locataire, la meilleure ordonnance pourrait consister à combiner plusieurs mesures de redressement. Ainsi, on pourrait ordonner au locateur d'effectuer les travaux indiqués d'ici une date donnée, à défaut de quoi le locataire sera autorisé à les faire et à déduire un montant donné de son loyer. Il sera habituellement préférable de posséder une preuve, sous forme d'estimations, du coût des réparations ou des remplacements.
L'article 207 de la LLUH prévoit que la Commission pourra établir des dispositions de recouvrement dans l'ordonnance au cas où le locateur ne remettrait pas au locataire la somme forfaitaire ordonnée.
L'article 30 permet à un membre d'ordonner une diminution de loyer. Il s'agit d'un montant adjugé exprimé sous forme de loyer passé ou à venir. Ce pourrait être une somme forfaitaire que le locateur doit verser au locataire, qui ordonne en fait au locateur de rembourser une portion du loyer payé. Ce pourrait être une ordonnance permettant au locataire de diminuer son loyer d'une certaine somme ou d'un pourcentage donné, ou même de ne pas verser de loyer pendant une période donnée. Ce pourrait être également une combinaison de ces mesures.
Ce redressement n'est pas indiqué lorsque le locateur n'a été mis au courant du problème qu'au moment de la présentation de la requête; il faudra tout de même ordonner que l'on y remédie. Et si le locateur a déjà remédié au problème dans un délai raisonnable, ce type de diminution n'est pas indiqué non plus.
La Loi ne fournit aucune indication permettant au membre de déterminer le montant de la diminution de loyer. Lorsqu'il établira le montant à ordonner, le membre devra tenir compte de la durée du problème et de sa gravité quant à ses répercussions sur le locataire.
Il faut tenir compte des répercussions que le problème aurait sur un locataire ordinaire ou les répercussions qu'une personne raisonnable s'attendrait à ce que le problème ait sur un locataire. Si le locataire est particulièrement vulnérable au problème en question, le locateur ne pourra être tenu redevable envers le locataire de pénalités plus importantes que s'il est établi que le locateur était au courant de la situation particulière du locataire.
Ce redressement ne doit pas être perçu comme une punition du locateur pour son comportement ou son défaut d'agir. Il s'agit d'un redressement octroyé au locataire pour l'état insatisfaisant des réparations, et tout autre désagrément ou toute autre perte de jouissance du logement locatif ou des aires communes.
La démarche habituelle consiste à envisager une diminution comme une portion du loyer. Autrement dit, le membre estimera le pourcentage de l'ensemble de l'abri et des services loués par le locataire dont ce dernier ne dispose plus. Ce pourcentage sera exprimé sous forme d'un montant en dollars, et logiquement celui-ci devra donc être plus ou moins important selon l'importance du loyer lui-même.
Lorsqu'il s'agit d'un logement locatif à loyer modeste, ou d'un loyer qui est inférieur aux logements comparables avoisinants, le locateur pourra soutenir que la norme d'entretien attendue devrait être moindre, et donc que la diminution devrait être nulle ou minimale. Il importe toutefois de garder à l'esprit que la Loi garantit un entretien adéquat, et ce, même lorsque le locataire a accepté le logement « tel quel ». C'est ce qu'a déclaré à ce sujet un juge de la Cour de l'Ontario :
[Traduction] Il est évident que la jurisprudence actuelle ne prévoit pas de formule magique pour calculer le montant approprié d'une diminution de loyer [...] Et même lorsqu'un locataire ne peut s'attendre à des installations luxueuses pour un loyer économique marginal, un locataire qui paie un loyer bas de gamme a tout de même droit à certaines garanties minimales7.
Le revers de ce problème est le suivant : un loyer plus onéreux justifie-t-il pour le locataire d'exiger un meilleur entretien, et donc des réparations plus rapides, une responsabilité accrue à l'égard des réparations, ainsi que des diminutions plus importantes lorsque les réparations ne sont pas effectuées ? Il semblerait qu'il s'agisse plutôt d'une attente découlant du contrat et non d'un principe de protection du locataire visé par la loi. L'article 20 ne doit donc pas être interprété dans ce sens.
Un locateur peut faire valoir qu'il n'est pas responsable des résultats imprévisibles dus à des problèmes d'entretien dont il n'avait pas connaissance ou dont on ne pouvait pas raisonnablement s'attendre à ce qu'il en ait connaissance. Ceci constitue en effet la loi, telle qu'elle a été établie par deux décisions de la Cour d'appel de l'Ontario. La Cour a rejeté la réclamation en dommages-intérêts d'un locataire qui est tombé au travers de marches pourries, dont le locateur ignorait l'existence8. Par contre, dans une affaire similaire où le locataire avait prévenu le locateur que les marches étaient branlantes, la Cour a jugé que le locateur devait verser des dommages-intérêts9. Il s'agissait ici de réclamations en « dommages-intérêts », mais le même principe s'applique aux diminutions de loyer.
Dans certaines décisions passées, la Cour a ordonné au locateur d'accorder une diminution du loyer pendant la durée de certaines réparations importantes effectuées au profit des locataires. On tenait ainsi compte de la perte de jouissance d'une partie du logement ou des services, et selon un certain point de vue, cette perte découlait directement (du moins dans certains cas) du défaut du locateur d'effectuer les réparations nécessaires plus tôt. Par contre, on pourra également soutenir qu'une diminution est improductive, car le locateur ne disposera pas de l'argent nécessaire pour effectuer les travaux et l'on dissuadera ainsi les locateurs d'apporter les améliorations nécessaires.
La Cour suprême du Canada a établi la règle fondamentale dans Herbold c. Pajelle Investments Ltd.10 Elle a déclaré qu'une diminution du loyer ne doit être accordée que dans des circonstances très exceptionnelles, pour tout défaut d'offrir les services et les aires communes durant un bref délai, afin d'effectuer les réparations et les rénovations nécessaires. La Cour a souligné que lorsque les délais dont le locateur a besoin pour remplir ses obligations sont longs et importants, il faut ordonner une diminution de loyer.
Dans l'affaire Greenbranch Investments Ltd. c. Goulborn11, la Cour d'appel a déclaré que les réparations effectuées par le locateur dans une telle situation ne privaient pas les locataires de la jouissance et de l'utilisation de l'habitation.
L'article 8 du Règlement de l'Ontario 516/06 établit les critères que doit appliquer la Commission pour déterminer si des travaux d'entretien, de réparation ou d'amélioration des immobilisations effectués par un locateur constituent une entrave importante, les critères pour déterminer s'il y a lieu d'ordonner une diminution de loyer, ainsi que les règles de calcul d'une diminution de loyer. Ces règles s'appliquent lorsqu'une requête vise à déterminer qu'un locateur a entravé de façon importante la jouissance raisonnable d'un logement locatif par un locataire, mais elles ne s'appliquent pas à une requête visant à déterminer qu'un locateur a manqué à son obligation de réparer ou d'entretenir le logement locatif ou l'ensemble d'habitation.
Lorsqu'un locateur n'a effectué que peu d'entretien pendant une longue période et qu'il en découle une situation grave qui exige un certain temps pour être résolue, le locateur devra être tenu responsable de la perte de jouissance du logement ou des installations communes par le locataire durant les réparations. Mais lorsque le locateur applique un programme d'entretien raisonnable, dont un entretien préventif, et qu'il agit de manière responsable pour remédier à un problème qui exige d'importantes réparations, il ne convient pas d'ordonner une diminution de loyer.
Cette démarche impose des obligations plus importantes aux locateurs qui ne s'acquittent pas de leurs obligations d'entretien, tout en encourageant les locateurs responsables à entreprendre des projets importants.
Par conséquent, même si l'on prouve que le bon entretien d'un ensemble d'habitation n'exclut pas de conclure à l'existence de problèmes d'entretien particuliers auxquels il faut remédier, ceci aura une incidence sur une compensation sous forme d'une diminution de loyer. Il ne faudra donc accepter les preuves d'un bon programme d'entretien que lorsque le locataire réclame une diminution de loyer et que cette mesure de redressement peut être ordonnée.
Il ne faudra avoir recours à ce redressement que dans des situations graves et uniquement lorsque le locataire en fait la demande ou qu'une administration publique exige que l'on vide les lieux. On pourra également l'ordonner si les deux parties y consentent, lorsqu'elles estiment par exemple qu'elles ne peuvent poursuivre la relation.
Il faudra résilier la location lorsque le logement locatif est impropre à l'habitation. Ainsi, si un désastre comme une inondation s'est produit et que le locateur ne souhaite pas remettre immédiatement le logement locatif en état et prendre des dispositions pour loger le locataire à l'hôtel en attendant, on pourra résilier la location rétroactivement à la date à laquelle l'inondation a eu lieu, et ordonner une diminution de loyer à partir de cette date (similaire à la compensation dans l'autre sens).
Le membre pourra également choisir ce redressement lorsque l'état du logement locatif est tel qu'il menace la sécurité des locataires ou leur bien-être. Cependant, il faudra généralement accorder au locateur une possibilité raisonnable de remédier à la situation avant l'ordonnance de résiliation.
Lorsque l'éviction du locataire est ordonnée, la date effective de l'éviction ne doit pas se situer avant celle de la date de résiliation de la convention de location indiquée dans l'ordonnance.
Le membre peut ordonner au locateur de verser au locataire les frais raisonnables que celui-ci a engagés ou qu'il engagera pour remplacer des biens lui appartenant et qui ont été endommagés, détruits ou dont il a été disposé à la suite du manquement du locateur à ses obligations. Ces frais ne doivent être accordés que lorsque la réparation des biens appartenant au locataire n'est pas une option raisonnable.
Le membre peut ordonner au locateur de verser au locataire une compensation pour les autres frais raisonnables que le locataire a engagés ou qu'il engagera à la suite du manquement du locateur à ses obligations. En outre, la Commission peut, dans certains cas, accorder des dommages-intérêts généraux en cas de manquement à la convention de location.
Le membre peut aussi interdire au locateur ce qui suit :
Chacune de ces mesures de redressement peut être comprise dans une ordonnance pour une période donnée jusqu'à ce que le locateur :
Il convient de noter qu'un membre doit conclure qu'un locateur n'a pas terminé les éléments figurant dans un ou plusieurs ordres d'exécution de travaux relatifs qui se rapportent à un manquement « grave » à une norme ou obligation pertinente. Ce qu'il faut entendre par un manquement grave est discuté dans la Ligne directrice 7, « Mesures d'allègement pour les cas d'expulsion : Report ou rejet de l'expulsion », dans la rubrique intitulée « Manquement grave aux obligations du locateur ».
L'article 30 permet également à la Commission de rendre toute autre ordonnance qu'il juge appropriée.
La Commission est investie aux termes de la Loi sur l'exercice des compétences légales de rendre des ordonnances provisoires. Il s'agit d'un redressement indiqué lorsque le locateur n'a manifesté aucune intention d'effectuer les travaux nécessaires et que le membre est d'avis qu'il ne se conformera pas à une ordonnance. Il s'applique tout particulièrement lorsqu'il ne serait pas indiqué d'autoriser le locataire à effectuer les travaux en raison de la nature des réparations nécessaires. Le membre pourra rendre une ordonnance provisoire qui prévoira une diminution appropriée du loyer tous les mois jusqu'à ce que le locateur achève les réparations. Cette mesure aura pour effet d'encourager le locateur à effectuer les travaux nécessaires rapidement.
Dans des situations où les travaux doivent être effectués très rapidement, on pourrait retarder la décision relative à la diminution de loyer en ajournant l'affaire pendant un bref délai, ce qui permettra au locateur de se présenter à une date ultérieure pour montrer que les travaux ont été réalisés. L'avantage de cette méthode est qu'elle favorise la réalisation des travaux sans placer le membre dans une situation où il doit rendre une ordonnance définitive assortie de conditions (qui pourraient s'avérer difficiles à faire prévaloir pour le locataire). Il faudra généralement établir une date pour l'ajournement, mais dans certains cas on pourra ajourner l'affaire sans fixer de date, en permettant aux parties de ramener l'affaire devant la Commission sous réserve d'un préavis de sept jours à l'autre partie.
Une autre possibilité serait d'ordonner au locateur d'effectuer les réparations dans un délai précis, mais en ajoutant qu'à défaut de terminer les travaux dans ce délai, le locataire pourra récupérer le montant nécessaire pour effectuer les travaux en le déduisant de son loyer. Ou encore, si le locateur n'a pas effectué les travaux d'ici la date limite fixée, le locataire aura droit à une diminution de loyer pour chaque tranche de loyer payable jusqu'à l'achèvement des travaux.
Le membre pourra aussi combiner les mesures de redressement indiquées ci-dessus lorsqu'il estime la mesure pertinente.
1 Cette directive ne traite pas des autres responsabilités prévues à l'article 161 relativement aux parcs de maisons mobiles ou aux zones résidentielles à baux fonciers. Pour un parc de maisons mobiles ou une zone résidentielle à baux fonciers, le locateur assume d'autres obligations particulières en vertu de l'article 161, comme enlever ou éliminer les ordures, garder en bon état les chemins du parc et le réseau d'évacuation des eaux d'égout, etc. Bien que ces obligations soient aussi susceptibles d'exécution forcée en vertu du paragraphe 29(1), elles ne sont pas directement traitées dans la présente directive.
2 Voir Fleischman c. Grossman Holdings Ltd. (1976), 16 O.R. (2d) 746 (C.A.) au sujet des clauses d'exclusion dans des baux et Burt Dozet Management Inc. c. Goharzad [2001] O.J. No. 695 (Div. Ct.).
3 Dans Herbold c. Pajelle Investments Ltd., [1976] 2 S.C.R. 520, la Cour suprême du Canada a jugé que les « locaux loués » ne se limitent pas au logement locatif, mais qu'ils englobent les installations et les aires communes mises à la disposition des locataires. La loi éclaircit davantage ce point par l'utilisation des termes « logement locatif » et « ensemble d'habitation ».
4 (1975) 7 O.R. (2d) 769 (Co.Ct.)
5 [1943] 1 All E.R. 68.
6 Règlement de l'Ontario 517/06.
7 Prenor Trust Company of Canada c. Karen Forrest [1993] O.J. No. 1058 (C. just. de l'Ont.)
8 Dans McQuestion c. Schneider (1975), 8 O.R. (2d) 249 (C.A.), la Cour a rejeté l'argument du locataire, selon lequel l'obligation de réparer imposait une obligation stricte ou absolue au locateur.
9 Dans Dye c. McGregor (1978), 20 O.R. (2d) 1 (C.A.), la Cour a établi que cet avis suffisait à établir un certain degré de besoin de réparation et a déclaré que le locateur était responsable
10 [1976] 2 R.C.S. 520
11 [1972] O.J. No. 956 (C.A.)